mercredi 22 février 2012

Demi-pause pour auditions

(Je l’avoue, je me trouve drôle quand je peux ouvrir avec un titre comportant des éléments de musique.)

Depuis quelques mois, je participe à des auditions. Je suis membre de la SPACQ, la société professionnelle des auteurs et compositeurs du Québec. Professionnelle est un bien grand mot, je crois. La société compte peut-être – je n’en suis pas sûre – beaucoup de membres qui mènent une vraie carrière professionnelle mais elle comporte aussi un très grand nombre de membres comme moi dont le professionnalisme est une lointaine aspiration.

Peu importe. La SPACQ organise des activités de formation assez intéressantes, parfois avec d’autres organismes, comme l’Association québécoise des éditeurs de musique, etc. Je m’y suis inscrite il y a un peu plus d’un an dans le but de me motiver et dans l’espoir de faire des rencontres. Mon premier objectif est largement atteint, mon second pas du tout. Un sur deux, c’est quand même pas si mal…

Au nombre des activités de formation proposées, cette année, il y avait un certain nombre de rencontres où des formateurs écoutaient et commentaient des chansons proposées par des membres. Ma première expérience a été plutôt bizarre – j’avais fait écouter les Mots d’amour. J’en suis ressortie avec l’impression d’avoir reçu des commentaires plutôt hum-hum, au point d’en avoir un peu le cafard pendant quelques jours. D’autant plus que j’avais entendu des commentaires assez positifs sur des chansons que je trouvais mauvaises (pour ne pas dire pourrites). C’est la semaine suivante qu’Élisabeth a écouté l’enregistrement que j’avais fait de la rencontre sur mon iPad et qu’elle m’a dit que j’avais fort mal compris ce qui m’avait été dit. Pour ne donner que deux exemples, je croyais avoir compris qu’un formateur trouvait la chanson peu intéressante  parce que c’était une chanson d’amour et qu’un autre avait trouvé le refrain plutôt banal. Dans les faits, le premier formateur avait dit qu’il y avait tellement de chansons d’amour qu’il était difficile d’en faire d’intéressantes, et que celle-là l’était. Et le second formateur avait dit que le refrain était simple mais qu’il continuait de lui trotter dans la tête depuis la fin de la chanson. Méchante différence ! Deux amies artistes m’ont dit des choses fort intéressantes à la suite de l’expérience, que je leur avais racontée avec moult détails. L’une m’a dit, c’est difficile mais tu dois te faire une carapace et continuer le processus. L’autre m’a dit, c’est étrange comme on a tendance à croire plus facilement les choses désagréables.

Pour ce genre d’activités, la SPACQ retient les services de formateurs du milieu, professionnels de carrière, qui ne sont peut-être pas des grands noms mais qui ont en général une solide expérience. Parmi les gens qui participent, comme moi, il y a de tout. Les chansons présentées sont assez souvent, je trouve, pas très bonnes. Je regrette, mais j’ai toute ma vie travaillé dans le texte. Des phrases boiteuses, des verbes qui ne vont pas avec le complément qu’on leur impose, de la prosodie tout croche (DEEEEE-vant moi je TEEEEEEEEE vois, etc.), des clichés malhabiles, et j’en passe et des pires. Vous me permettrez de vous assurer que la licence poétique et la métaphore, je sais ce que c’est et que ça, ça n’en est pas.

Aux deux dernières rencontres, j’ai soumis Les Fleurs. Roger trouve que c’est ma meilleure chanson, celle qui fesse dans le dash (sic). À la première audition où je l’ai soumise, l’un des deux formateurs a dit que, selon lui, c’était le parfait exemple d’une chanson dont la musique ne va pas du tout avec les mots. Il a été passablement véhément et je lui ai dit que je trouvais que, dommage, mais moi, c’était ce que je voulais. Il a simplement répondu, ah ben là, et s’est détourné. Il faut dire qu’à la suite de petits bouts de conversations privées que nous avions eus jusque là, nous étions tombés d’accord sur de nombreux points, dont la pauvreté peu inspirante de beaucoup de textes, et je crois qu’il attendait de moi du sous-Fauré, de la mélodie noble et un powême. Pas ce coup de poing (note à Dominique : chanson coup de poing, c’est ça que ça veut dire, ça fesse dans le dash). Hi hi. J’avais reçu aussi le compliment le plus mystifiant de ma (courte) carrière : commentant la ligne Si j’ai les yeux dans l’eau, c’t’à cause du silence, le deuxième formateur avait admiré l’opposition sensorielle, silence-yeux. Euhhhhhh ?

Hier soir, j’ai participé à une autre audition, formateurs et participants différents et après quelques hésitations, j’ai décidé de la soumettre à nouveau. Cette fois-là, j’ai eu des commentaires très positifs. Hard rock intense bien mené, structure solide, langage parlé naturel, images justes, prosodie impeccable, refrain à la mélodie très accrocheuse. L’un des formateurs m’a recommandé de repenser les mots du refrain, dont il n’aimait pas la répétition des premières lignes, et a aussi suggéré d’essayer d’introduire dans le couplet une modification de l’harmonisation, pour éviter les deux strophes à l’identique. Ça se discute, j’y réfléchis. Ensuite, ils ont commencé à discuter du fait que pour eux, la situation n’est pas claire. Y a-t-il, oui ou non, de l’ironie, est-ce que le personnage vit un rejet lucide ? Moi, ça me semble évident que oui, par la dureté de la musique, par l’emploi de bon débarras, etc. Et je crois qu’une des participantes a répondu que oui, la situation était claire.

Alors voilà. Ce sont des activités qui demandent passablement de préparatifs : réenregistrement d’une version mieux léchée, travail sur le mixage, préparation du matériel de la rencontre, etc. sans parler du temps de la rencontre elle-même. Hier, je suis partie de chez moi bien avant 17 h et je suis rentrée à 23 h 30. (Je l’avoue, je suis partie du lieu de la rencontre, près du pont Jacques-Cartier, j’ai tourné sur Papineau pour monter vers le nord et j’ai manqué le virage vers l’ouest… je me suis donc retrouvée sur le pont pour aboutir à Longueuil – soupir.)

En préparation à la rencontre d’hier soir, Élisabeth et moi avions travaillé fort pour produire une version de présentation de la douce Il neige encore. Je pense d’ailleurs que c’est ce genre de composition qu’attendait de moi le formateur qui n’avait pas aimé les fleurs. Roger l’aime peu (la chanson, pas le formateur… quoique le formateur non plus, de fait) – c’est sûr qu’on peut pas dire que ça fesse dans le dash, hi. Moi, j’entends retravailler le piano, le varier davantage. C’était après tout mon premier essai de m’accompagner au piano. Mon frère Jacques en aime beaucoup la mélodie que j’avais mise en ligne auparavant.

En passant, qui de mes lecteurs musiciens parviendra à identifier le fragment que je sais avoir piqué à quelqu’un – Debussy ? Bill Evans ? Jacques, Jean-Christophe, ça vous dit quelque chose, ça, et sa variante en finale ici ?

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10 commentaires:

DoMi a dit…

Jean-Christophe pense que les couleurs correspondent à du Debussy mais n'est sûr de rien…

DoMi a dit…

Je crois qu'Il neige encore est celle que je préfère, de toutes les chansons que tu as mises en ligne jusqu'ici…

Michelle a dit…

Eh bien c'est positif tout ça.... tu reviens de ta rencontre avec un petit bagage de bons commentaires. Bravo!
Je me rends compte que c'est beaucoup, beaucoup de travail, composer une chanson parole et musique.
Bravo, Hélène...
Michelle

Anonyme a dit…

Je te lève, bien haut, mon chapeau , et je te félicite, le petite bout de musique me fait penser à Debussy, mais c'est très peu pour me faire vraiment une idée. Alors continue j'adore tes textes !

Anonyme a dit…

J'ai écouté les musiques en lien et à date je reviens encore sur les vrais mots d'amour !!!

Hélène a dit…

@Suzanne et @Dominique
Je suis ravie de votre appréciation. Vos choix ne me surprennent pas vraiment…

Hélène a dit…

@Michelle

Oui, c’est du travail. Probablement autant que d’attraper un nu en 40 minutes. Et le paysage est moins intéressant.

DoMi a dit…

:-))

Roger Gauthier a dit…

Je ne vais pas y aller par quatre chemins ici, pas plus que d'habitude. Ce ne serait tout simplement pas tout à fait moi que de tricher.

C'est moi qui fais le mixage final de tes chansons la plupart du temps. Je connais bien les DEUX versions de cette chanson. Pourquoi as-tu choisi de me pas mettre en ligne celle qui, véritablement, fesse dans'l dash ???

Je suis un peu, pas mal, beaucoup désappointé.

Françoise a dit…

C'est beau Hélène , quelle douceur .Je t'embrasse fort .